CARE France et SERA œuvrent pour garantir le droit à la santé reproductive des femmes vulnérables de Roumanie.
Contexte
Le Sommet Mondial sur le Planning Familial s'est tenu en juillet 2012 à Londres, aboutissant à l'engagement des dirigeants mondiaux pour que 120 millions de femmes supplémentaires aient accès à des informations, des services et des produits de contraception dans les pays les plus pauvres d'ici 2020. Le but est de soutenir le droit des femmes de décider, librement et pour elles-mêmes, si elles souhaitent avoir des enfants, quand et combien.
A travers le monde, le réseau CARE travaille sur des programmes de santé reproductive dans 30 pays. CARE France, avec son partenaire local SERA ROMANIA, développe depuis plus de 10 ans un programme original de planning familial itinérant en Roumanie.
Malgré la réforme progressive du système de protection de l'enfance depuis la chute de Ceausescu il y a plus de 20 ans, le nombre de femmes continuant de mettre au monde et d'abandonner des enfants non désirés reste très élevé en Roumanie. En 2012, plus de 900 nouveau-nés ont été abandonnés dans les maternités du pays1. Ce chiffre est en hausse depuis 2010. Même si l'accès à la contraception s'améliore, avec 70% des femmes déclarant avoir recours à un moyen contraceptif en 20112, la Roumanie montre le taux le plus élevé d'avortements en Union Européenne (480 avortements pour 1000 naissances, contre un taux moyen européen de 226 pour 1000)3.
Ils sont, en 2013, une cinquantaine d'assistants sociaux et d'infirmières à sillonner la Roumanie pour aller à la rencontre des femmes qui n'ont pas accès aux services de planning familial existants, dans plus de la moitié des départements roumains.
Les résultats de ce programme de planning familial itinérant sont globalement encourageants, malgré les réticences rencontrées par les équipes, liées aux tabous, au faible niveau d'éducation, à l'entourage familial, et social, et au manque de coopération de certains services médicaux.
Dans ce contexte, il est plus important que jamais de continuer cet effort pour réduire le nombre de grossesses non désirées en Roumanie. L'objectif du programme est de couvrir tout le pays d'ici 5 ans.
1 Statistiques du Ministère du Travail, de la Famille, de la Protection Sociale et des Personnes Agées, 2012.
2 Source : Statistiques sanitaires mondiales, Organisation Mondiale de la Santé, 2011.
3 Source : Organisation Mondiale de la Santé, 2012.
Objectif
Informer et favoriser l'accès au suivi social et médical (surtout gynécologique) et à la contraception pour ces femmes vulnérables et isolées afin de réduire, à terme, le nombre de grossesses non désirées et ainsi le nombre d'avortements et le nombre d'enfants abandonnés.
Activités
SERA ROMANIA forme l'équipe et finance la mise en place du programme pendant deux ans environ (salaires, véhicule, carburant et consommables). L'équipe est ensuite sous la responsabilité des autorités locales, qui sont partenaires du projet dès sa mise en place.
Depuis 2003, CARE France a investi plus de 845 000€ pour la mise en place de ces équipes en Roumanie, qui ont rencontré et conseillé plus de 100.000 bénéficiaires, dont plus de la moitié a décidé d'utiliser un moyen de contraception. On constate dans les régions concernées une baisse très nette du nombre de grossesses non désirées, mesurable par la baisse du nombre d'avortements et du nombre d'abandons parmi ces populations vulnérables.

Témoignage d'une bénéficiaire
La bénéficiaire, âgée de 33 ans, habite dans le département de Covasna, au centre de la Roumanie.Cette femme vit avec son partenaire et deux de ses enfants, dans l'annexe d'une ferme. L'hébergement leur est offert en échange de travaux effectués à la ferme. Celui-ci est constitué d'une seule pièce, sans eau, ni canalisation.
La bénéficiaire a eu 8 enfants entre l'âge de 20 et 30 ans. 4 d'entre eux ont été placés chez des assistantes maternelles. Les deux derniers ont été adoptés par la même famille.
L'équipe du Planning Familial Itinérant du département a été contactée par la Protection de l'Enfance du département, après la naissance du dernier enfant, abandonné à la maternité.
Grâce aux conseils de l'équipe SERA, qui la suit depuis 2 ans, la bénéficiaire a choisi le mode de contraception le plus adapté à sa situation.
« Si j'avais eu connaissance des moyens de contraceptionsplus tôt dans ma vie, j'aurais pu éviter l'abandon de plusieurs enfants », a confié la jeune femme aux membres de l'équipe SERA lors d'une visite de suivi.
Témoignage de l'équipe de Ialomita
Ionela, d'origine Rom (à gauche) et Valentina (à droite) constituent (avec le chauffeur, rémunéré par la DGASPC), l'équipe itinérante de planning familial.
Interview et photos - octobre 2012
Le projet a démarré en août 2011
Qui sont les bénéficiaires ?
Les bénéficiaires viennent de familles très pauvres qui vivent souvent dans des conditions de grande précarité. Ce sont des femmes qui ont eu beaucoup d'enfants sans pouvoir les garder, ou qui ont subi beaucoup d'avortements.
Comment rentrez-vous en contact avec elles ?
Les hôpitaux et centres de jours nous aident à identifier les potentielles bénéficiaires de ce service. Nous organisons aussi des rencontres de groupes. Nous rencontrons également les maris ou concubins, qui ont beaucoup d'idées préconçues, à cause de rumeurs, de croyances tenaces. Nous faisons aussi le lien avec d'autres services sociaux. Certaines mairies ne nous procurent pas les listes de bénéficiaires potentielles, et nous devons alors les rencontrer pour les convaincre des bénéfices du programme.
Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?
Certains médecins locaux sont réticents à accueillir ces patientes. Une autre difficulté est que les allocations reçues pour les enfants est souvent le seul moyen de subsistance des familles, qui ne veulent donc pas renoncer à l'arrivée de nouveaux enfants. Enfin, dans la région, l'influence des prêtres est grande et ils sont en majorité contre l'utilisation de contraceptifs.
Êtes-vous contentes des résultats ?
Malgré les difficultés nous sommes contentes des résultats. Environ la moitié des femmes que nous rencontrons souhaitent instaurer une mesure de contraception.
En juillet 2013, après 2 ans de fonctionnement, l'équipe avait rencontré plus de 800 femmes, dont la moitié avait opté pour un moyen de contraception.
