Dans de nombreuses régions du monde, les humanitaires travaillent, parfois au péril de leur vie, pour aider des communautés entières. Le 19 août marque la Journée mondiale de l'aide humanitaire. Fanny Petitbon, responsable plaidoyer de CARE France, revient sur les enjeux de cette journée et les défis auxquels sont confrontés les travailleurs humanitaires. Voici 5 points pour mieux comprendre.

Que représente cette journée ?

Elle permet de souligner que nous faisons face à une multiplication des crises, et que le nombre de personnes affectées, et donc les besoins humanitaires, ont atteint un niveau inégalé. C’est un appel à la solidarité avec les 130 millions de personnes qui ont actuellement besoin d’une aide humanitaire pour survivre. 

En 2015, 65,3 millions de personnes vivaient loin de chez elles, déplacées par des conflits, le non-respect des droits humains, des catastrophes naturelles ou à cause du changement climatique. C’est la première fois depuis la Seconde guerre mondiale que le seuil des 60 millions de personnes déplacées est franchi. 

Cette journée est également l’occasion de nous souvenir de nos collègues qui ont perdu la vie dans le cadre de leurs fonctions. Chaque jour, des travailleurs humanitaires bravent des obstacles et des dangers pour venir en aide à celles et ceux qui en ont le plus besoin. 

L'association CARE aide les personnes ayant besoin d'une aide d'urgence

Quels sont les défis quotidiens des travailleurs humanitaires ?

Outre les défis logistiques de l'acheminement de l'aide dans des contextes en crise, il y a une forte augmentation des risques sécuritaires. Il y a quinze ou vingt ans, le logo d’une ONG était gage de sécurité. Aujourd’hui, cela a complètement changé. Il n’est pas rare que les travailleurs humanitaires soient pris pour cibles.

Ces 20 dernières années, 3 946 travailleurs humanitaires ont été tués, blessés ou kidnappés. Représentant 83,5 % des victimes, les équipes nationales sont les plus vulnérables à ce type d’attaques. 

Les pays les plus dangereux pour les humanitaires sont l’Afghanistan, la Somalie, la Syrie, le Yémen et le Soudan du Sud. 

La communauté internationale doit agir plus fermement en cas de violations du droit humanitaire international. Car la multiplication des violences contre les humanitaires met en péril non seulement nos équipes mais surtout les vies et le bien-être des millions de personnes qui dépendent de l’aide humanitaire pour survivre. 

Qu'appelle-t-on "besoins humanitaires" ?

Les choses qui nous semblent basiques, telles que l’eau courante, la nourriture, les vêtements ou une maison, sont un luxe pour ceux affectés par une crise humanitaire. 

CARE compte 12 000 employés à travers le monde. Nous travaillons dans les zones les plus pauvres et dangereuses du monde. En dépit de ces risques, il est essentiel que nous poursuivions notre action car les populations touchées comptent sur notre soutien qui peut faire une réelle différence. 

Nous leur apportons une réponse d’urgence mais nous pensons aussi au long terme : il faut aider ces populations à se reconstruire en soutenant l’agriculture, le développement économique…. 

Nous soutenons également les droits et les libertés des groupes les plus vulnérables, comme les femmes et les filles. Ce sont elles qui sont les plus menacées par les violences sexuelles, l’exploitation et le trafic lors de conflit ou de catastrophe naturelle. 

L'association CARE aide les réfugiés et déplacés

Quelle est la responsabilité des Etats ?

Dans le cadre de nos actions de plaidoyer, nous interpellons les Etats à plusieurs niveaux pour qu’ils s’engagent en faveur des personnes qui ont besoin d’une aide d’urgence pour survivre : 

  • Le manque de financement est dramatique. Moins d’un tiers des 21,6 milliards de dollars nécessaires pour répondre aux besoins humanitaires les plus urgents en 2016 ont été collectés pour le moment. 
  • Les pays à revenus élevés et intermédiaires doivent également prendre leur responsabilité en termes d’accueil et de soutien aux personnes déplacées et réfugiées. Nous avons lancé de nombreux appels, notamment auprès de l’Union européenne, afin que les capacités d’accueil augmentent et que les réfugiés bénéficient d’une réelle protection. Les six pays les plus riches de la planète accueillent moins de 9% du nombre total de réfugiés et de demandeurs d’asile. L’Allemagne, qui a accueilli la plupart des réfugiés arrivés en Europe (736 000), reste loin derrière la Turquie, le Liban et le Pakistan en termes de nombre de réfugiés sur son sol, et se place de peu devant l’Iran et l’Éthiopie. Et la France reste en dessous de 350 000 personnes accueillies. 

Le prochain sommet de l’ONU pour les réfugiés et les migrants, prévu le 19 septembre, représente une chance historique pour les nations de travailler ensemble et de partager ces responsabilités. Nous rappelons, à cette occasion, que l'aide au développement ne doit pas être instrumentalisée pour servir une approche sécuritaire, telle que la politique initiée ces derniers mois par l'Union européenne.  

Quelles sont les évolutions nécessaires pour le monde humanitaire ?

Il faut une mobilisation globale en faveur des populations qui ont besoin d'une aide humanitaire. 

Cette année, la Journée de l’aide humanitaire intervient après le premier Sommet humanitaire mondial. Les leaders du monde entier se sont engagés collectivement à réduire les souffrances et aider davantage les populations touchées par les crises. Il est nécessaire de respecter ces engagements et de les transformer en actions concrètes. Et cet effort doit être porté par tous, du chef du gouvernement aux citoyens ordinaires, aux communautés affectées ou d’accueil. Nous avons tous un rôle essentiel à jouer. 

Il va falloir aussi adapter nos réponses. Cela fait longtemps que les ONG alertent sur le fait que répondre aux besoins humanitaires d’année en année ne suffit pas. En moyenne, une personne déplacée par la guerre restera loin de chez elle pendant 17 ans. Il faut une approche qui respecte la dignité des personnes et renforce leur autonomie. Il faut apporter une aide d’urgence tout en améliorant la capacité des populations à rebondir sur le long terme.