En Roumanie, nombreuses sont les femmes qui n’ont pas accès à des soins de santé maternelle et reproductive. Pour y remédier, CARE et son partenaire SERA mettent en place des services de planning familial itinérant. L’une de ces équipes nous explique comment des centaines de femmes ont désormais la possibilité de choisir leur sexualité et leur avenir. 

L'association CARE aide les femmes en Roumanie
CARE et SERA ont mis en place des services de planning familial itinérant dans plus de la moitié des 41 départements roumains. Ici, une équipe de la région d’Argès lors d’une consultation. © 2017 / CARE

Anca, infirmière, et Andrea, assistante sociale, forment l’une des équipes de planning familial itinérant initiées par CARE et SERA dans le département de Bacau. En compagnie de Cécile Tissot, qui coordonne ce programme, elles nous expliquent les enjeux de leur travail.  

Quelles sont les difficultés auxquelles sont confrontées les femmes que vous accompagnez ?

Le manque de suivi gynécologique et, plus largement, d’accès à des soins médicaux est un vrai problème. Sur 149 femmes enceintes rencontrées au cours des dernières semaines, 66 % ne bénéficiaient d’aucun suivi prénatal. Un grand nombre de complications ainsi que de décès maternels et infantiles pourraient être évités grâce à un meilleur accès à des soins de santé. 

Quels sont les autres conséquences de ce manque d’accès aux soins pour les femmes ?

56 % des femmes que nous avons récemment rencontrées n’avaient pas désiré leur grossesse. Parce qu’elles n’ont pas accès à des moyens de contraception, elles sont privées du droit à disposer de leur corps. Trop de femmes vivent leur sexualité dans la peur d’une grossesse non prévue, de maternités ou d'avortements rapprochés, au péril de leur santé. Toutes les femmes devraient avoir la liberté de choisir si et quand elles veulent devenir mères. 

Vous sensibilisez également de très jeunes filles…

Oui, car en 2015, 380 jeunes filles sont devenues mères dans notre département. Or, certaines de ces adolescentes, en situation de pauvreté et d’isolement, ont ensuite abandonné leur enfant, faute de ressources pour l’élever. Pour éviter ce traumatisme pour la mère et l’enfant, nous faisons beaucoup de sensibilisation auprès des jeunes de 13 à 18 ans. 

Dans les écoles, nous abordons de nombreux sujets : la puberté, la grossesse et les maladies sexuellement transmissibles (MST). Garçons et filles peuvent nous poser des questions, notamment par écrit pour celles et ceux qui veulent s’exprimer de manière anonyme. La sexualité reste un sujet très tabou. 

Comment ce service de planning familial s’inscrit-il au niveau local ?

Nous devons absolument collaborer avec les médecins et services de santé locaux, car nous n’effectuons que des consultations de base. Il est ensuite nécessaire que ces femmes soient suivies par des médecins spécialistes. 

Nous travaillons aussi avec les autorités nationales et locales car, après la période de mise en place soutenue par CARE et SERA, les équipes seront gérées et financées par les services sociaux locaux. C’est une manière d’en assurer la pérennité. 

Comment incluez-vous les hommes dans ces décisions liées au planning familial ?

Les hommes sont inclus dans notre approche. En général, ils sont assez ouverts, mais certains sont réticents à laisser des professionnels entrer dans leur intimité. Le travail avec les mairies et les autorités religieuses est essentiel pour lutter contre des attitudes parfois sexistes et patriarcales. La semaine dernière, un homme a refusé de nous faire entrer chez lui. La mairie a alors contacté le couple et nous avons pu y retourner et discuter.

Parfois, des femmes optent pour une mesure de contraception sans l’accord de leur conjoint. Nous les accompagnons dans leur choix. Notre travail est de permettre aux femmes de prendre conscience de leurs droits sexuels et reproductifs, notamment concernant la maîtrise de leur fécondité.