Après presque cinq ans de conflit et malgré les efforts humanitaires pour répondre aux déplacements de populations, à la famine et aux maladies, le Yémen demeure la pire crise humanitaire  au monde. La situation continuera de se détériorer tant qu’aucune action urgente ne sera entreprise pour faire cesser la violence et prendre en charge l’ensemble des besoins humanitaires. Voici le message de 24 ONG à destination des États réunis à l’Assemblée générale des Nations unies.

Augmentation des combats : les civils sont les premiers affectés

Malgré l’accord de Stockholm, la situation humanitaire continue de se dégrader : augmentation des besoins humanitaires et escalade de la violence. Les combats continuent sur plusieurs fronts, particulièrement à Al Dhale’e, Taizz, Hodeïda, Hajjah et Aden. Les civils et les infrastructures publiques (hôpitaux, écoles, fermes, marchés, services d’approvisionnement en eau et en nourriture) sont régulièrement attaqués en toute impunité.

Les attaques incessantes sur les écoles montrent également les dangers auxquels sont exposés les enfants : en 2018, il y a eu 44 attaques confirmées. 32 cas d’occupation militaire d’écoles ont été également recensés.

Des centaines de millions de personnes ont également été déplacées de force, dont 350 000 en 2019. La majorité des Yéménites sont piégés dans ce conflit, dans l’impossibilité de fuir ou de se faire soigner à l’étranger, du fait de la fermeture des ports et aéroports.

Les Yéménites au bord de la famine

L’utilisation de la faim comme arme de guerre aggrave une situation humanitaire déjà catastrophique. Environ 17 millions de personnes, soit plus de 60% de la population, souffrent d’insécurité alimentaire. Parmi elles, un million de femmes enceintes et allaitantes et deux millions d’enfants souffrent de malnutrition aiguë.

Le conflit est la principale cause de cette crise alimentaire aggravée par un taux élevé de chômage, des prix exorbitants et la crise monétaire.

L’augmentation de l’aide alimentaire au cours des derniers mois a réussi à atténuer les impacts de la crise alimentaire. Mais le manque de financements internationaux ne permet pas de répondre à l’ensemble des besoins. 

L’économie peine à se stabiliser

Déjà fragile, l’économie yéménite continue de s’affaiblir. La dépréciation du rial, qui a atteint son niveau le plus faible depuis 2018, en est la preuve. Les services publics se détériorent, les fonctionnaires ne sont plus payés.

Avec la prolongation du conflit et l’érosion des filets sociaux, des millions de Yéménites n’ont plus de sources de revenus et ne peuvent plus faire face aux chocs économiques. Trop souvent, les familles doivent faire des choix impossibles : se nourrir ou se soigner. La situation est particulièrement préoccupante pour les familles monoparentales, dirigées par des femmes.

Les difficultés d’action des ONG

Les efforts humanitaires sont entravés par les combats, les restrictions à l’importation, la fermeture de voies maritimes, terrestres et aériennes ainsi que les obstacles administratifs empêchant l’accès à certaines zones ou retardant l’acheminement des denrées.

5,1 millions de personnes vivent dans des zones difficiles d’accès pour l’aide humanitaire. Et 5,9 millions de personnes sont affectées par des retards dans la mise en œuvre de projets dus aux obstacles administratifs imposés par les autorités, selon les Nations unies.

L’aéroport de Sanaa est fermé aux vols commerciaux depuis août 2016 et le fret en conteneurs est toujours bloqué au port d’Hodeïda. L’importation de produits de première nécessité (nourriture, carburant, médicaments) est extrêmement difficile. Ces produits deviennent de plus en plus chers, du fait de leur rareté. Plus récemment, l’aéroport d’Aden a également été temporairement fermé en raison de la reprise des combats. 

Les demandes des ONG à la communauté internationale

La communauté internationale doit faire pression sur les parties au conflit afin qu’elles :

  • respectent le droit international.
  • mettent immédiatement en place des mesures pour prévenir et mettre un terme aux violations du droit international humanitaire, dont les graves violations des droits des enfants et les violences faites aux femmes. Ceci, en coopérant et en appliquant leurs recommandations du Groupe d’éminents experts sur le Yémen, des représentants spéciaux et des rapporteurs des Nations unies.
  • s’engagent en toute bonne foi et sans condition à poursuivre le processus politique initié par l’accord de Stockholm. Les femmes, les jeunes, la société civile et les autres groupes marginalisés doivent être impliqués dans la résolution politique de la crise. C’est le seul moyen de mettre un terme à la guerre et de mettre en place des solutions durables à cette terrible crise humanitaire.
  • instaurent un cessez-le-feu.
  • garantissent l’accès total et sécurisé à l’aide humanitaire et aux produits commerciaux de première nécessité dans tout le Yémen.

Les 24 ONG signataires

Action Contre la Faim ; Adventist Development and Relief Agency ; CARE ; Danish Refugee Council- Danish Demining Group ; FHI 360 ; Future Forum ; Global Communities ; Handicap International – Humanity and Inclusion ; Human Appeal ; International Medical Corps ; International Rescue Committee ; INTERSOS ; Islamic Help ; Islamic Relief Worldwide ; Medecins du Monde ; Mercy Corps ;     Norwegian Refugee Council ; Oxfam ; Première Urgence – Aide Médicale Internationale ; Relief International ; Save the Children ; Search for Common Ground ; War Child ; ZOA