Le Conseil de Sécurité de l’ONU a jusqu’au 10 juillet pour renouveler la résolution 2504, qui garantit l’acheminement de l’aide humanitaire de l’ONU pour plus de quatre millions de Syriennes et Syriens qui vivent dans les zones non-contrôlées par le Gouvernement syrien. Les dirigeant.e.s d’ONG appellent le Conseil de Sécurité à renouveler cette résolution pour une période de 12 mois et à ré-autoriser l’accès des Nations Unies au Nord-Est de la Syrie afin d’assurer un accès à l’aide humanitaire vitale pour les populations vulnérables, dans un contexte où les agences doivent augmenter leur capacité de réponses pour faire face à la pandémie de COVID-19.

Excellences,

Le Conseil de Sécurité de l’ONU fait aujourd’hui face à une décision monumentale. D’ici le 10 juillet, le Conseil doit agir pour s’assurer que des millions de civils syriens ne se voient pas refuser l’accès à une assistance humanitaire vitale. Le Conseil doit voter le renouvellement de la Résolution 2504 (2165) en assurant ainsi le maintien de l’acheminement transfrontalier de l’aide des Nations Unies conforme aux principes humanitaires, en fonction des besoins uniquement. Peu de décisions sont aussi graves que celle-ci, particulièrement au cœur de la pire pandémie que le monde ait connu depuis plus d’un siècle.

La population syrienne vit aujourd'hui dans des conditions dramatiques

Pour plus de quatre millions de Syriennes et Syriens vivant dans des zones non-contrôlées par le Gouvernement syrien, le mécanisme transfrontalier constitue une bouée de sauvetage permettant de fournir l’accès à la nourriture, aux abris, à l’hygiène et aux services médicaux vitaux. Sans cela, les populations vont souffrir de la faim et n’auront plus accès aux services de santé, y compris les services nécessaires pour la réponse à la Covid-19. Autrement dit, des vies seront perdues.

Sans une résolution qui sécurise cet accès pour les 12 prochains mois, les acteurs et actrices de l’humanitaire ne pourront pas se préparer et répondre à la propagation du Covid-19. La réponse humanitaire dans des zones telles que Idlib – où 76% de la population sont des femmes et des enfants, et qui a fait face à des déplacements sans précédent au début de cette année – est déjà en grande difficulté. Elle est en difficulté alors que jamais, dans l’histoire du mécanisme onusien, le volume d’aide délivrée de manière transfrontalière n’a été aussi élevé.

L'aide transfrontalière est indispensable face à la menace du Coronavirus

Par ailleurs, des années de conflit ont poussé le système de santé syrien jusqu’au point de rupture. Les hôpitaux ont été endommagés et détruits, souvent de manière délibérée par les belligérants, le personnel médical qualifié a été forcé à fuir et les populations sont presque totalement dépendantes de l’aide internationale pour les fournitures médicales telles que les équipements de protection ou les vaccins. Une propagation de la Covid-19 ferait basculer un système de santé déjà particulièrement affaibli vers un point de non-retour. La détérioration rapide de l’économie dans les zones transfrontalières, notamment dans le Nord-Ouest de la Syrie, contribue aussi à rendre les populations encore plus dépendantes de l’aide internationale.

Dans le Nord-Est de la Syrie, la décision du Conseil de Sécurité adoptée en janvier pour restreindre l’accès de l’ONU avec le retrait du point de passage de Yaroubia a eu des conséquences fatales. De manière tragique, le système de santé de la région, qui était déjà affaibli, a été durement frappé. Malgré une poignée de livraisons transfrontalières depuis janvier, seulement 31% des établissements de soin qui étaient auparavant soutenus par le point de passage de Yaroubia ont pu être fournis, et les ONG ne sont pas en capacité de combler le vide qui a été laissé. Dans un contexte où six cas de Covid-19 sont déjà confirmés dans le Nord-Est de la Syrie – et le chiffre réel est probablement bien plus élevé –, 11 établissements de santé font face au risque de fermeture ou d’interruption des services, de graves pénuries d’équipements médicaux de protection, de ventilateurs et de lits d’hôpitaux sont en cours, et les entrepôts des ONG sont en rupture de stock totale de 29 médicaments classés comme « essentiels ». Le Conseil de Sécurité a le pouvoir de répondre à ces besoins urgents en ré-autorisant l’accès de l’ONU par Yaroubia.

Dans le Nord-Est et le Nord-Ouest de la Syrie, de telles lacunes en matière de capacité de soins de santé signifient que la prévention de la Covid-19 est cruciale. Pourtant, pour les personnes déplacées vivant dans des camps surpeuplés, avec un accès limité et irrégulier à l’eau et à l’assainissement, le lavage des mains et les mesures de distanciation sociale sont presque impossibles. Cela constitue un cocktail potentiellement fatal pour une population hautement vulnérable et densément peuplée, faisant face à une pandémie mondiale et ne bénéficiant d’aucun moyen nécessaire pour stopper et répondre à la propagation de masse du virus.

L'assistance transfrontalière doit être rétablie pour une durée minimum de 12 mois

La justification humanitaire de cette résolution demeure aussi valide aujourd’hui que lorsqu’elle a été pour la première fois adoptée en 2014, et elle est d’autant plus depuis la propagation de la Covid-19. L’action humanitaire basée sur les principes, tant par des modalités de « cross line » ou transfrontalières, demeure l’unique moyen de soutenir les 11.1 millions de Syriennes et Syriens en besoin d’assistance. Le renouvellement de la Résolution 2504 autorisant l’assistance transfrontalière par les postes frontières de Bab al-Awa et Bab al-Salam, pour une durée minimum de 12 mois, et ré-autorisant le passage de Yaroubiya sont des éléments clés pour parvenir à cet objectif. Il n’y a pas d’autre alternative et aucun moyen d’accroître la réponse à la Covid-19 sans ces conditions .

Nous comptons sur le Conseil de Sécurité pour garantir que cette ligne d’approvisionnement vitale soit étendue à toutes les Syriennes et tous les Syriens afin qu’elles et ils puissent jouer leur rôle dans la lutte contre la pandémie mondiale. La Covid-19 nécessite une solidarité internationale et des actions pour s’assurer que les plus vulnérables ne sont pas laissé.e.s de côté. L’heure n’est pas à la réduction de l’accès humanitaire.

Signataires

  • David Miliband, Président Directeur Général, International Rescue Committee
  • Inger Ashing, Directrice Générale, Save the Children
  • Jan Egeland, Secrétaire Générale, Norwegian Refugee Council
  • Andrew J. Morley, Président Directeur Général, World Vision International
  • Sofía Sprechmann Sineiro, SecrétaireGénéral, CARE International
  • Manuel Patrouillard, Directeur Général, Humanity & Inclusion – Handicap International
  • Samuel A. Worthington, Directeur Général, InterAction
  • Henriette Killi Westhrin, Secrétaire Générale, NorwegianPeople’sAid
  • Beth deHamel, Directrice Générale par intérim, Mercy Corps
  • Alexandre Giraud, Directeur Général, Solidarités International
  • Els Hertogen, Directeur Général, 11.11.11
  • Othman Moqbel, Directeur Général, Syria Relief
  • Dr. Zaher Sahloul, Président, MedGlobal
  • Nadia Alawa, Directrice Générale, NuDay
  • ŠimonPánek, Directeur Général, People in Need
  • Novella Mori, Directrice Exécutive, Un Ponte Per
  • NeginTagavi, Secrétaire Générale, SWEDO - The Swedish Development Aid organization
  • Mufaddal Hamadeh, MD, Président, Syrian American Medical Society
  • Dr. Corinna Schäfer, Co-Présidente, CADUS e.V
  • Osman Dulgeroglu, Directeur Exécutif, Embrace Relief
  • Dr. Jihad Qaddour, Président, Syria Relief and Development (SRD)
  • Mohamed YaserTabbara Esq, Président, American Relief Coalition for Syria (ARCS)