La COP26 s’ouvre ce dimanche et les États auront un programme chargé. Que faudrait-il pour que cette énième COP soit vraiment efficace ? Explication de Fanny Petitbon, experte climat de l’association CARE, qui sera sur place à Glasgow pour suivre les négociations. 

Les enjeux de cette COP26 sont immenses

Sur les cinquante dernières années, le nombre de catastrophes d'origine météorologique, climatique ou hydrique a été multiplié par 5, soit en moyenne une par jour. Si le changement climatique n’épargne plus aucun pays, ce sont les plus pauvres d’entre eux qui continuent d’en payer le plus lourd tribut, et qui sont d’autant plus fragilisés par la pandémie de Covid-19. Les conséquences du changement climatique sont multiples: crises humanitaires et conflits, accroissement des inégalités, déplacements forcés de population ou encore la faim. L’un des exemples les plus marquants est l’ile de Madagascar, en proie à la première famine au monde directement attribuée au changement climatique. Pourtant, Madagascar a émis à peine 0,01% de C02entre 1933 et 2019,selon le Global Carbon Project, un signe très concret de l’injustice climatique!

Les enjeux de cette COP26 sont immenses. Il est indispensable et urgent que les Etats tiennent les engagements pris lors de la COP21 à Paris de tout faire pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C mais aussi que les pays du Nord en particulier paient enfin la dette climatique qu’ils ont envers les pays du Sud, du fait de leur responsabilité historique en tant que principaux émetteurs de gaz à effet de serre.

Nos attentes pour que cette COP26 soit vraiment efficace

  • Objectif 1.5°C : Pour l’instant, les objectifs de réduction d’émissions des États ne sont pas du tout à la hauteur et nous condamnent à une trajectoire de réchauffement climatique de +2,7°C d’ici 2100, bien au-delà de la limite de +1,5°C actée dans l’accord de Paris. Pourtant, si les leaders du G20 - qui se réuniront à Rome à la veille de la COP26 - revoient de toute urgence leurs copies, notamment en adoptant des objectifs de réduction des émissions beaucoup plus ambitieux pour 2030 et un objectif de zéro émission nette d’ici 2050, la température mondiale pourrait être limitée à 1,7 °C selon une étude de WRI et Climate analytics  
  • Financements : Le plan de mise en œuvre dévoilé lundi par le Canada et l’Allemagne ne nous a pas convaincu. Même si les pays riches devraient enfin tenir leur promesse faite il y a 12 ans de mobiliser 100 milliards de dollars par an pour soutenir les pays du Sud, ils prévoient de le faire avec 3 ans de retard, c’est-à-dire seulement à partir de 2023 ! Or le changement climatique lui ne se met pas en pause en attendant. Chaque année qui passe sans honorer cet engagement augmente la facture finale car les impacts climatiques vont se multiplier et s’intensifier, en particulier dans les pays du Sud. Dans le plan, les pays riches expliquent qu'ils s'efforceront de trouver un meilleur équilibre entre le soutien à l'atténuation et à l'adaptation, mais aucun calendrier n'est fixé pour parvenir à un équilibre 50/50, comme l’a pourtant appelé de ses vœux le Secrétaire général des Nations Unies lors de la pré COP il y a moins d’un mois. Visiblement, les besoins des populations les plus vulnérables ne sont pas toujours pas prioritaires. Pour l’instant, seul un quart des financements climat pour les pays du Sud soutient des actions d’adaptation. La feuille de route fait aussi l’impasse sur l'engagement pris lors de la COP15 de veiller à ce que les financements climat soit nouveaux et additionnels à l’aide publique au développement, un élément clé pour s’assurer qu’on ne pioche dans l’enveloppe destinée à soutenir l’accès aux services essentiels (éducation, santé, eau) pour financer l’action climatique.  
  • Pertes et dommages : Enfin, les pays du Nord doivent cesser de faire l’autruche et s’engager enfin à débloquer des financements additionnels aux 100 milliards de dollars pour répondre aux pertes et dommages, les pertes irréversibles dues au changement climatique. Pour les pays qui sont déjà dans le couloir de la mort, c’est une question de justice climatique. Pour cela, il faut créer un mécanisme de financement spécifique sur le sujet, mais également rendre opérationnel et effectif le Réseau de Santiago créé à la COP25 qui pour l’instant se limite à un site web. 

Les pays riches doivent revoir leurs copies de toute urgence. Il est encore possible d’agir, mais il est surtout TRES URGENT de le faire. Tout est une question de volonté politique : les leaders se montreront-ils à la hauteur de l’urgence pour cette COP26 ?  

Contact presse

Fanny Petitbon, experte climat de CARE, sera présente à Glasgow pour suivre les négociations. Elle est disponible pour répondre aux interviews. Contactez Camille Nozières : nozieres@carefrance.org, 07 86 00 42 75