Selon une analyse des tous derniers plans de financement climat soumis aux Nations unies, les États développés ne tiendront pas leurs promesses d’augmenter suffisamment leur soutien aux pays les plus affectés par le changement climatique. Alors que les pays du G7 se réuniront la semaine prochaine – du 11 au 13 juin - les experts climat de CARE alertent : non seulement l’objectif des 100 milliards de dollars pour l’année 2020 n’a pas été atteint, mais les prévisions ne s’annoncent pas meilleures d'ici 2025.
20 milliards de dollars manquants
Selon les toutes dernières données rendues publiques par 23 pays et l’Union européenne, les financements climat prévus entre 2021 et 2025 resteront insuffisants. CARE a analysé et classé les rapports des États via un système de points afin de mesurer le respect de leurs engagements financiers. Les deux meilleurs scores obtenus ne sont que de 11 sur 20. Cinq pays ne reçoivent aucun point, montrant le peu de détail et d’engagement de leurs futurs financements.
L’année dernière, à peine 80% des financements promis par les pays riches il y a plus de 10 ans ont été réunis. C’est 20 milliards de dollars manquants : un chiffre énorme pour aider les pays et les populations les plus affectés par la crise climatique. Pendant ce temps,10 des plus grandes compagnies aériennes au monde ont reçu 62,7 milliards de subventions publiques entre mars et septembre 2020.Et dans les nouvelles données, rien n’annonce que ce fossé sur les 100 milliards annuels sera comblé d’ici 2025. En dépit des discours de solidarité de plusieurs pays riches, force est de constater que le compte n’y est toujours pas.
Cela pourra mettre en danger les négociations de la COP26
« Tous les plans récemment rendus public concernant les futurs financements climat manquent de détails, de prévisibilité et de clarté quant à leur mise en œuvre. Cela pourrait contribuer à endommager la confiance entre pays du Nord et du Sud, pourtant cruciale en cette période déjà troublée. Et donc mettre en danger les négociations de la COP26», explique Fanny Petitbon, responsable plaidoyer et experte climat de CARE France.
Aussi, d’après les données analysées, seuls deux pays (l’Irlande et la Nouvelle-Zélande) reconnaissent que les objectifs d’adaptation sont sévèrement sous-financés. Ils ont donc annoncé prioriser l’adaptation à l’atténuation dans les prochaines années. Mais cela risque de ne pas être suffisant : actuellement, seuls 25% des financements climat mondiaux sont dédiés à l’adaptation. L’objectif d’atteindre un équilibre à 50/50 avec les fonds alloués à la réduction des émissions semble donc hors de portée pour les années à venir. C’était pourtant un engagement fort pris à Paris en 2015.
Ce n'est pas qu'une question d'argent, mais de vies humaines
« C’est pourquoi, lors du sommet du G7, les chef.fe.s d’État et de gouvernement doivent s’engager à augmenter l’ensemble de leurs financements climat pour respecter leurs obligations. Il ne s’agit pas de déshabiller Pierre pour habiller Paulette : ces financements climat doivent venir en complément de l’aide publique au développement officielle, qui est nécessaire pour combattre la pauvreté. Il est essentiel que ces fonds supplémentaires soient fournis sous formes de dons pour éviter de condamner des pays déjà vulnérables à un cercle vicieux de la pauvreté», poursuit Fanny Petitbon.
Les États développés ne répondent aujourd’hui pas à leur dette climatique historique. Responsables de la vaste majorité des émissions mondiales de gaz à effet de serre, ils ont une obligation morale de soutenir les victimes de la crise climatique.
« Seul un pays du G7 (le Royaume-Uni) a annoncé clairement sa volonté de prioriser les pays vulnérables. En l’absence d’un sursaut des pays riches, les pays pauvres continueront à compter leurs morts du fait de catastrophes causées par le changement climatique : ce n’est pas qu’une question d’argent, mais de vies humaines», alerte Chikondi Chabvuta, coordinatrice de plaidoyer de CARE pour l’Afrique Australe.
Notes aux éditeurs
Les pays analysés dans ce rapport sont : Luxembourg, Suède, Nouvelle Zélande, Finlande, Irlande, Royaume-Uni, Australie, Suisse, Belgique, Allemagne, Pays-Bas, Norvège, Danemark, France, Italie, Canada, Portugal, Espagne, Autriche, République tchèque, Grèce, Japon, Slovaquie, États-Unis
Les résultats obtenus : le rapport de CARE donne une analyse détaillée des plans présentant les futurs financement climat soumis par les Etats, selon sept critères (augmentation des financements prévue entre 2021 et 2015, répartition équilibrée des financements entre adaptation et réduction des émissions, garantie que les fonds bénéficieront aux populations les plus vulnérables, additionalité à l’aide publique au développement...) et les classe via un système de points.
- Les meilleurs scores obtenus ne sont que de 11 sur 20 par le Luxembourg et la Suède. Ces pays peuvent donc largement améliorer leurs pratiques en fournissant davantage de détails sur les projets, programmes et pays qu’ils comptent financer dans les années à venir. Ils doivent aussi clarifier comment ils comptent cibler efficacement les populations les plus vulnérables, puisque ces deux pays n’obtiennent que la moitié des points sur ce critère.
- En bas du classement, cinq pays ne reçoivent aucun point (Autriche, Grèce, Japon, République Tchèque, Slovaquie), car leurs rapports ne fournissent que très peu d’informations sur leurs futurs financements climat. Rien ne garantit non plus que de potentiels futurs financements climat seront additionnels à l’aide publique au développement.
- 11 autres pays ont obtenu un quart des points ou moins. Ce groupe inclut des pays tels que le Danemark, la France, les Pays-Bas et la Norvège, des pays qui se présentent en général comme des leaders de la coopération internationale et de la lutte contre le changement climatique.
Pour consulter le rapport : cliquez ici