À quelques jours de la clôture de la COP26, le message adressé aux pays riches est très clair: ”d’une part, personne ne se laisse plus berner par vos discours pleins d’empathie mais vides d’action pour soutenir les pays du Sud. D’autre part, si vous persistez à faire l’autruche, les pays vulnérables vont se tourner vers les tribunaux pour exiger un dédommagement pour les impacts irréversibles du changement climatique dont vous êtes responsables.”

Dès le premier jour de la COP, double coup de poker

  • Le sujet des pertes et dommages irréversibles du changement climatique s’est taillé une place centrale dans l’agenda politique de la COP alors qu’il devait se limiter à des discussions techniques. En cause? L’annonce fracassante par l’Écosse du déblocage d’une enveloppe d’1,17 million d’euros spécifiquement pour financer les pertes et dommages. Du jamais vu de la part d’une nation riche. Si le montant reste symbolique par rapport à l’ampleur des besoins estimés à 580 milliards de dollars par an d’ici à 2030 rien que dans les pays en développement, l’Écosse brise un tabou et force les grandes puissances comme les États-Unis ou l’Union européenne à devoir se positionner à leur tour et cesser de se chercher des excuses.
  • À ceci s’ajoute le lancement par les îles de Antigua et Barbuda et Tuvalu d’une commission pour explorer les voies légales permettant d’exiger réparation auprès des pays pollueurs pour les dommages qu’ils ont causé à des populations qui vivent bien au-delà de leurs frontières.

Pourquoi ce changement de ton ?

Face à des impacts de plus en plus fréquents et sévères, et à leurs appels en détresse restés sans réponse, les petits États insulaires ont estimé qu’il était plus que temps de taper du poing sur la table. Quand on parle de conséquences dévastatrices du changement climatique, il est question de pertes de vies humaines en raison des cyclones ou inondations, de sécheresses qui font que les populations n’ont plus rien à boire ou manger, de montée des eaux qui oblige les habitants des îles à fuir abandonnant leurs terres et leur culture...

Les pays du Nord, relativement épargnés jusqu’à une date récente, sont désormais eux aussi confrontés à des phénomènes météorologiques de plus en plus violents. Seulement, s’il est possible pour un pays comme l’Allemagne de débloquer immédiatement 30 milliards d’euros pour réparer les dégâts causés par les inondations de juillet, ce n'est pas le cas des pays du Sud. Et lorsqu’il s’agit de faire preuve de solidarité envers ces pays, les pays du Nord, cyniques, refusent d’agir.

Réparer une dette historique

Il est primordial de rappeler aux États que ces financements ne sont pas de la charité, mais la réparation d’une dette historique. En effet, les pays en développement sont en première ligne d’un réchauffement climatique dont les pays développés sont historiquement responsables. Pour rappel : la moitié la plus pauvre de la population mondiale est responsable de seulement 7 % des émissions de CO2 au cours des 25 dernières années. Sur la même période les 10% des personnes les plus riches de la planète sont responsables de plus de la moitié des émissions de CO2.

Il reste trois jours aux pays riches pour changer la donne et s’engager clairement à financer les pertes et dommages dans la décision-chapeau de la COP26: c’est l’unique manière de démontrer aux pays déjà engagés dans une course contre la montre pour leur survie qu’on agit enfin pour eux.

Contact média

Fanny Petitbon, experte climat de CARE, est disponible pour répondre aux interviews. Contactez Camille Nozières : nozieres@carefrance.org, 07 86 00 42 75

Notes aux rédactions

Les pertes et dommages irréversibles peuvent être la conséquence de phénomènes météorologiques extrêmes tels que des ouragans, cyclones, inondations, feux de forêt, ou de phénomènes à occurrence lente comme la montée du niveau des mers ou les sécheresses. Ces événements peuvent entraîner des pertes de vies humaines, de revenus (destruction de récoltes, terres non cultivables), des dégâts voire des destructions d’hôpitaux, d’écoles et de routes de mais aussi territoire et de culture (perte de tradition ou de langue en raison des déplacements migratoires forcés).