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La COP30 sur le climat se prépare alors que la situation mondiale est de plus en plus dégradée : des chefs d’État ouvertement climatosceptiques gouvernent, des États bafouent le droit international sous nos yeux. Ainsi, le 16 septembre, la commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme de l’ONU qualifiait dans son rapport de « génocide » les actions menées par Israël à l’égard des Palestiniens dans la bande de Gaza.
Nous assistons donc à des attaques frontales contre les droits humains et à des reculs en matière de lutte contre la pauvreté, les inégalités, les discriminations et l’environnement. La lutte contre le changement climatique semble laissée de côté, pourtant celui-ci constitue désormais un lien incontournable entre toutes ces crises. À cet égard, le Sommet des dirigeants, qui aura lieu les 6 et 7 novembre à Belém, au Brésil, est une occasion historique pour les États d’enfin faire face à leur responsabilité.
L’Accord de Paris n’est pas une baguette magique
Il y a dix ans, un accord mondial historique se scellait à Paris, sous présidence française. Cet accord dit de Paris avait redonné espoir dans la capacité des États à mettre de côté leurs différends pour protéger l’humanité. Aujourd’hui, son avenir est compromis : selon le Programme des Nations unies pour l’environnement, nous sommes sur une trajectoire alarmante de réchauffement entre 2,6 et 3,1 degrés avant la fin du siècle, bien supérieure à l’engagement pris en 2015 de ne pas dépasser la limite de 1,5 degré.
L’Accord de Paris n’est pas une baguette magique, il nécessite un véritable engagement politique. La Cour internationale de justice l’a rappelé le 23 juillet dernier : les plans climat des États doivent impérativement être compatibles avec la trajectoire de 1,5 °C, et chaque pays a le devoir d’adopter toutes les mesures nécessaires pour y parvenir.
Respecter l’Accord de Paris n’est donc pas une option, c’est une « obligation juridique » et une « responsabilité historique », selon les mots de la Cour internationale de justice. Cet accord doit tracer la voie d’une transition plus juste qui ne laisse personne de côté, accompagnant les travailleurs et travailleuses ainsi que les plus vulnérables vers des sociétés durables.
L’engagement européen est essentiel
Le temps où la France présidait les négociations en 2015 est un lointain souvenir. Si Emmanuel Macron veut honorer le titre de gardienne de l’accord de Paris que l’on prête à la France, il doit arrêter de freiner l’ambition climatique. Plutôt que de consacrer son énergie à détricoter les normes socio-environnementales européennes, son gouvernement pourrait s’engager pour un système agricole juste et écologique, ainsi que pour une protection de la biodiversité de la plus haute ambition, et, dans la foulée, défendre bec et ongles l’adoption d’un objectif climat européen 2040.
Cet engagement européen est une condition de la réussite de la COP30, une des clés qui permettront de restaurer la confiance avec les pays du Sud, éprouvés par l’hypocrisie et le manque de soutien financier des pays du Nord. Ces financements existent, encore faut-il avoir le courage politique de taxer les entreprises de l’industrie fossile et les milliardaires, responsables de la crise climatique.
Mais concernant la sortie des énergies fossiles justement, la France n’est pas au rendez-vous non plus. Elle continue d’ouvrir de nouveaux sites d’exploitation d’énergies fossiles, et laisse les entreprises françaises les multiplier partout dans le monde, avec l’appui des banques, assureurs et investisseurs nationaux, au détriment du déploiement des énergies renouvelables.
Faillite de la France sur ses outre-mer
La France a failli sur un autre volet dont on ne parle pas assez : sa responsabilité vis-à-vis des territoires ultramarins. Les outre-mer, pourtant en première ligne de la crise climatique, ne bénéficient pas de la stratégie d’adaptation et de prévention nécessaire pour faire face à des catastrophes comme Chido, à Mayotte. La COP30 se tiendra aux portes de la Guyane, composée à 90 % de forêts tropicales humides d’une richesse exceptionnelle.
Ce voisinage oblige la France à regarder en face sa responsabilité particulière : celle d’un État qui porte la voix de l’Accord de Paris, mais qui, dans ses propres territoires ultramarins, peine à protéger ses habitants et ses écosystèmes des ravages climatiques, et n’a toujours pas ratifié la Convention reconnaissant les droits des peuples autochtones.
Les écologistes réprimés
Partout dans le monde, les libertés d’expression, de manifestation et d’association sont menacées. Depuis l’adoption de l’Accord de Paris, en 2015, au moins 1 700 personnes ont été tuées pour avoir défendu les terres et l’environnement, ainsi que leurs droits et ceux des générations futures [1].
En France, les personnes qui s’unissent et se mobilisent pour protéger les terres d’infrastructures néfastes font face à une répression croissante. Dans ce contexte, garder espoir devient chaque jour plus difficile. Et pourtant, cet espoir reste notre seul horizon, pour continuer à défendre les îles menacées de submersion, les écosystèmes de disparition et les populations contraintes de trouver refuge.
[1] Le nombre de 1 700 a été obtenu en additionnant les chiffres annuels de l’ONG Global Witness entre 2015 et 2024.
Une crise au cœur de toutes les crises
Depuis des mois, la société civile brésilienne, d’Amérique latine et du monde travaille à l’organisation d’un Sommet des peuples, un espace hors des tensions des négociations officielles de la COP30. En son sein s’organisera la résistance collective face au musellement des voix dissidentes et face à l’inaction des gouvernements. Les moyens avec lesquels elle agira sont encore inconnus à l’heure où l’on publie, mais un manifeste a d’ores et déjà été diffusé.
Dans tous les cas, la COP30 devra être un moment assez fort pour répondre au contexte alarmant qui est le nôtre et pour rappeler que la crise écologique est au cœur de toutes les autres crises. Nous n’avons plus le temps de nous voiler la face, le climat ne peut plus être une variable d’ajustement politique. Il en va de la survie de l’humanité.
Les signataires
Camille Amand
Présidente, ActionAid France
Sophia Arouche
Responsable des programmes de recherches, Ghett’up
Virginie Amieux
Présidente, CCFD-Terre solidaire
Christophe Barbarini
Président, Solidarité Recours Péi (La Réunion)
Yannick Anvroin
Administrateur, Fédération Artisans du monde
Matthieu Barthas
Président, Guyane Nature Environnement
Sylvain Benusiglio et Marie Nguyen
Coprésident et coprésidente, Association Le Taille-Vent
Lydie Bonnet-Semelin
Présidente, Fondation Terre solidaire
Altynaï Bidaubayle
Chargée de campagnes, World’s Youth For Climate Justice
Zoé Bordeau
Responsable de programme, Initiative Développement
Franzeska Bindé
Porte-parole, ANV-COP21
Pierre Bosman
Porte-parole, Cilaos mon amour
Allain Bougrain-Dubourg
Ligue pour la protection des oiseaux
Nathalie Brucks
Présidente, Latopia
Didier Bourse
Membre du bureau collégial, Attac Réunion
Éric Buchet
Président, Experts-Solidaires
Léo Broudic
Doctorant, Agence de recherche pour la biodiversité à La Réunion
Adrien Chaboche
Délégué général, Emmaüs international
Luc Châles
Cofondateur, Global Youth Biodiversity Network France
Armelle De Saint Sauveur
Responsable communication et plaidoyer, Slow Food France
Morgane Créach
Directrice générale, Réseau Action Climat
Louis Deusy
Référent, Pour un réveil écologique
Estelle Crochelet
Directrice, Agence de recherche pour la biodiversité à La Réunion
Raquel Diaz Gonzales
Coordinatrice des activités antinucléaires, Réseau Sortir du nucléaire
Marie-Gabrielle Domizi
Présidente, Observatoire national des alimentations végétales
Amélie Franco
Porte-parole, GreenFaith
Yvette Duchemann
Vice-présidente, Oasis Réunion
Jean-Claude Futhazar
Président, Société réunionnaise pour l’étude et la protection de la nature
Noura Elouardi
Coordinatrice exécutive, Centre de recherche et d’information pour le développement
Antoine Gatet
Président, France Nature Environnement
Didier Gérard
Administrateur, Humusation France
Guillaume Grimma
Responsable légal, Effet de serre toi-même
Édith Guiochon
Ccoordinatrice par intérim, Coalition Eau
Murielle Guilbert
Codéléguée, Union syndicale Solidaires
Idrissa Gueye
Coordinateur, consortium des organisations de jeunes/Saint-Louis
Linda Hoareau
Secrétaire, KOLAIR974
Damien Huet
Codirecteur, Association pour la transition bas carbone
Gilbert La Porte
Président, Domoun la Plaine
Nicolas Huet
Président, Association nature Océan indien
Jean-Philippe Larrieu
Président, No Plastic in my Food
Jean-François Julliard
Directeur général, Greenpeace France
Jean-Pierre Lassaire
Référent, Association A.R.B.R.E.S.(Arbres Remarquables : Bilan, Recherche, Études et Sauvegarde)
Anne Laroutis
Présidente, Manifestation.Alternatif.France
Claire Le Floch
Fondatrice, Cataliz
William Lebedel
Friendship France
Bruno Lemarchand
Président, Santé en transition
Nadine Lauverjat
Déléguée générale, Générations futures
Christian Leger
Président, Société d’études ornithologiques de La Réunion
Jean-Paul Maugard
Président, Fédération des associations agréées de pêche et de protection des milieux aquatiques de La Réunion
Éric Morbo
Directeur, Surfrider Foundation Europe
Bruno Morel
Président, Emmaüs France
Alexandre Morel et Emmanuela Croce
Codirecteur et codirectrice, CARE France
Véronique Moreira
Présidente, Women Engage for a Common Future
Laetitia Moreau-Gabarain
Association citoyenne pour une heure équitable et durable
Claire Morvan
Présidente, Plus de Climat dans les Médias
Emmanuelle Mouls
Déléguée générale, Renaissance écologique
Martine Noury
Présidente, Association K-pab6T
Ismaël Paillard
Président, Fridays for Future
Anne-Sophie Mouraud
Présidente, Coexistence Crew
Magali Payen
Directrice, On est prêt
Juliette Penin
Présidente, Orchestre du nouveau monde
Lucie Pinson
Directrice générale, Reclaim Finance
Fanny Petitbon
Responsable France, 350.org
Jean-Baptiste Poncelet
Directeur Action carbone solidaire, Fondation GoodPlanet
Mathieu Pinault
Président, Tran’Sphère environnement
Clara Prosperi
Coprésidente, Déclic collectif
Agnes Rossetti
Présidente, ONG Initiative Environnement
Déborah Rouach et Alice Apostoly
Codirectrices, Institut du genre en géopolitique
Anne Savinel
Présidente, Amnesty International France
Olivier Saladin
Administrateur, Paysages de France
René Siegfried
Secrétaire, Alerte Océan Indien
Jérémie Suissa
Délégué général, Notre affaire à tous
Gaspard Tamagny
Porte-parole, Alternatiba
Nathalie Tehio
Présidente, Ligue des droits de l’Homme
Jason Temaui
Président, Te Motu
Nadia Trainar
Responsable programme climat, Geres
Adèle Ungria
Co-coordinatrice de plaidoyer, Jeunesse ambassadrice pour le climat et la biodiversité
Kamera Vesic
Directrice, PIKPIK environnement
Youlie Yamamoto
Porte-parole, Attac France
Léa Zaidat
Coordination des mobilisations (Paris), Action Justice Climat
Caroline Vornière
Présidente, Association Germin’Acteurs