Des questions brûlantes sur la question des pertes et dommages climatiques
Quelles sont les avancées des discussions sur le futur Fonds pertes et dommages, victoire historique de la COP 27 après des décennies de blocage, et qui devrait être mis en place à la COP 28 ? Répondra-t-il aux attentes des pays vulnérables qui plaident en sa faveur depuis des années ? Les négociations à Bonn permettront-elles de dépasser les clivages Nord/Sud ? Quelles sont les dynamiques à l’œuvre entre gouvernements autour de la réforme du système financier international pour répondre aux besoins des populations les plus durement touchées par l’urgence climatique ? Quelles sont les attentes des ONG autour des prochains rendez-vous politiques internationaux ?
Décryptage de 3 rendez-vous internationaux sur le climat en mai et juin 2023
Fanny Petitbon, experte climat de l’ONG CARE, décrypte les enjeux de ces négociations internationales, en particulier sur le sujet brûlant du financement des pertes et dommages – les conséquences irréversibles du changement climatique – face à une grosse actualité française et internationale : la réunion du comité de transition Fonds Pertes et Dommages du 27 mai, l’intersession CCNUCC à Bonn 5 au 15 juin, et le prochain Sommet pour un nouveau pacte financier mondial du 22 et 23 juin à Paris.
Encore des tensions sur les pertes et dommages, à mi-mandat du nouveau Comité
Six mois après la victoire historique obtenue à la COP27 sur la création d’un Fonds destiné aux pertes et dommages, les négociations internationales s’intensifient pour lui faire prendre forme, malgré des tensions toujours existantes.
Le Comité de transition composé de 24 membres dont 14 venant de pays en développement, s’est réuni il y a quelques jours. En charge de répondre à plusieurs questions particulièrement épineuses (Qui devra abonder ce Fonds ? Qui pourra en bénéficier ?), il est déjà à la mi-parcours de son mandat.
En dépit de la bonne volonté affichée par les gouvernements, force est de constater que les pays développés campent sur leurs positions depuis la COP27 : ils continuent de mettre l’accent sur le besoin de renforcer en priorité les dispositifs existants (réponse humanitaire, mécanismes assurantiels, systèmes d’alerte précoce…) alors qu’ils ont montré des défaillances face à la magnitude des pertes et dommages. Les pays en développement plaident, eux, pour que le nouveau Fonds puisse fournir une réponse immédiate aux besoins humanitaires suite à un cyclone, accompagner la relocalisation de communautés dont les territoires sont devenus inhabitables, et prendre en charge les pertes non économiques (disparition de langues et traditions).
L'enjeu de Bonn : débloquer les discussions sur les pertes et dommages
L’intersession de Bonn sera l’occasion pour les membres du Comité sur les pertes et dommages de partager l’état d’avancement de leurs travaux et d’engager un dialogue avec les États qui n’y siègent pas, ainsi qu’avec les populations les plus durement touchées par les pertes et dommages : les populations autochtones, les femmes, les jeunes et les personnes en situation de handicap. Il est important d’arriver à débloquer au plus vite les discussions et nécessaire de démontrer aux populations en première ligne de l’urgence climatique, que leurs appels de détresse ont enfin été entendus. Le Fonds ne doit pas rester une coquille vide.
Oui, car le temps presse. Rien qu’en 2022, les événements climatiques extrêmes survenus dans les pays en développement ont causé plus de 109 milliards de dollars de pertes (1). Et la facture va continuer de s’alourdir si l’inaction climatique persiste ! Il est urgent que les pays historiquement les plus pollueurs, dont les États-Unis, l’Union européenne, paient leur juste part. Mais il faudra plus. Alors comment faire ?
Le principe de pollueur-payeur au Sommet sur les financements innovants pour le climat
Des solutions, des sources de financement innovantes à portée de main, pourraient mobiliser des sommes conséquentes pour répondre aux besoins des pays les plus durement touchés par le changement climatique. C’est l’un des sujets-phare du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial organisé par le gouvernement français les 22 et 23 juin.
Parmi les options sur la table, la mise en place de taxes reposant sur le principe de pollueur-payeur : sur les émissions des secteurs aérien et maritime, sur les transactions financières, sur les millionnaires et milliardaires et bien sûr, les entreprises du secteur fossile lourdement responsables de l’urgence climatique et qui continuent d’amasser des profits faramineux (2).
À lui seul, le secteur fossile a réalisé 2,8 milliards de dollars de bénéfices par jour au cours des 50 dernières années, soit mille milliards de dollars par an en moyenne depuis 1970.
CARE appelle Emmanuel Macron à faire preuve de leadership lors du Sommet en s’engageant, à travers une déclaration politique aux côtés d’autres chefs d’État et de gouvernements, à taxer les entreprises fossiles et à rediriger une partie des revenus vers le Fonds pertes et dommages. Il est temps de faire payer les plus pollueurs. Chacun doit prendre sa part dans cet effort collectif.
Contact médias
Pour toute demande d’interviews, contactez Delphine Holstein, holstein@carefrance.org, 07 86 00 42 75
Fanny Petitbon, notre experte climat, va participer à ces trois réunions internationales. Walter Mawere de CARE Somalie sera à Paris pour le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial. Il pourra témoigner sur les impacts de la crise climatique, le besoin de financements climat et humanitaires.
Notes aux rédactions
- (1) Source : The loss and damage collaboration, 2023
- (2) Une pétition d’une dizaine d’ONG (CARE – Greenpeace – OXFAM – Terre des Hommes France – Réseau Action Climat – Climate Action Network – Alternatiba – ANV-COP 21 – 350.org), visant à encourager la taxation du secteur fossile, sera mise en ligne le lundi 5 juin.
- Pour en savoir plus sur CARE : l’association internationale CARE agit partout où le changement climatique bouleverse des millions de vies et aggrave les inégalités et l’extrême pauvreté dans le monde. Nous apportons une aide vitale d’urgence aux plus vulnérables touchées par des catastrophes naturelles, nous renforçons leurs capacités à s’adapter aux impacts climatiques sur le long terme, grâce à des techniques agricoles résilientes par exemple. Et nous portons la voix des populations que nous soutenons au sein des conférences internationales sur le climat afin que les gouvernements agissent contre le changement climatique.
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