Ce matin est sorti le rapport le plus important de la décennie en matière de science du climat, celui du Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC). Il expose les risques d’un réchauffement de la planète à 1,5 °C et la manière de les éviter. Les Etats ne peuvent plus faire l’autruche : ils doivent passer à la vitesse supérieure et annoncer l’augmentation de leurs engagements climatiques au plus tard à la COP24 qui se tiendra dans moins de 2 mois. Fanny Petitbon responsable plaidoyer de CARE revient sur les conclusions de ce rapport.
Limiter le réchauffement climatique : une question de survie
Les scientifiques sont désormais formels : si rien n’est fait, le seuil de 1,5°C sera dépassé entre 2030 et 2052. Or 1,5°C ne doit pas rester un chiffre sur le papier, chaque dixième de degré compte ! Le rapport du GIEC souligne que les ouragans, inondations ou sécheresses qui se sont abattus sur la planète en 2017 et 2018 ne sont qu’un avant-goût des conséquences dévastatrices et irréversibles d’un monde à +1,5°C.
Limiter le réchauffement sous ce seuil est une véritable question de survie pour des millions de personnes qui sont déjà menacées par la faim, la montée du niveau des mers ou par les évènements météorologiques extrêmes notamment dans les pays du Sud, plus vulnérables. Un réchauffement climatique limité à 1,5°C c’est par exemple 55 millions de personnes en moins touchées par la faim en Afrique (par rapport à +2°C) et 73 millions de personnes en moins touchées par des vagues de chaleur extrêmes en Europe (par rapport à 2°C).
Il est encore temps d’agir !
Si cela peut sembler compliqué, ce n’est pourtant pas impossible ! La science nous montre que nous disposons des solutions pour y arriver. Mais le temps presse et les 2 prochaines années sont cruciales si les pays veulent vraiment se donner les moyens d’atteindre cet objectif.
Le rapport est clair : pour rester sous la barre des 1,5°C, les émissions de CO2 doivent diminuer de 45% entre 2010 et 2030 et il faut arriver d’ici à 2050 à ne pas produire plus de gaz que ce que les océans et forêts peuvent absorber naturellement. Cela signifie qu’il faut stopper l’exploitation des énergies fossiles au plus vite, viser un objectif de 100% d’énergies renouvelables et repenser en profondeur nos modes de déplacement, de production et d’alimentation.
Le principal obstacle n’est pas technique mais politique. C’est pourquoi il faut que les États revoient à la hausse leurs engagements climatiques d’ici à 2020 et augmentent massivement leur soutien financier aux populations les plus vulnérables aux changements climatiques. Les pays développés du G7, dont la France prendra la présidence l’année prochaine, doivent prendre la responsabilité de faire le premier pas.
En France et en Europe, un plan d’action 1,5°C dès maintenant !
Les populations les plus vulnérables au Sud, sont déjà et en resteront les premières victimes du réchauffement climatique. Mais les pays d’Europe ne seront pas non plus épargnés. En 2017, les événements météorologiques extrêmes ont déjà coûté 14 milliards d’euros à l’UE et le coût de ces impacts pourrait atteindre 120 milliards d’euros à +2° et jusqu’à 190 milliards à +3°C.
Ce constat doit amener les responsables politiques européens à réagir pour protéger leurs citoyen.ne.s. Les objectifs climatiques européens fixés en 2014 sont très loin de ce que l’Europe peut et doit faire. Alors que les émissions globales de gaz à effet de serre s’étaient stabilisées de 2014 à 2016, elles sont reparties à la hausse en 2017, et l’Union Européenne faisait partie des principaux responsables, aux côtés des Etats-Unis, de l’Inde et de la Chine.
Pour faire sa part de l’effort, l’Union européenne doit revoir au plus vite son objectif à horizon 2030 pour garantir une trajectoire zéro émission nette bien avant 2050. La France doit peser de tout son poids dans ce sens et faire preuve d’exemplarité.
Les scientifiques confirment aujourd’hui ce que nous pressentions. Un monde à 1,5°C c’est un air plus sain, des emplois en plus, des impacts limités sur les écosystèmes et la biodiversité, des économies, des populations moins dépendantes des énergies fossiles et maîtres de leurs énergies renouvelables. Mais c’est surtout une réduction de la pauvreté, des inégalités et 53 millions de vies qui pourraient être sauvées dans le monde en limitant la pollution de l’air et la température !