Rabia, 16 ans, est Afghane. Elle fait partie des dizaines de milliers de réfugiés bloqués en Grèce. Entre espoir, solitude, attente, combat pour une vie meilleure et déception… Rabia raconte son quotidien en photos.
« Pour l’instant nous sommes bloqués ici, en Grèce. »
Des centaines de réfugiés vivent à Elliniko, un ancien aéroport et complexe olympique reconverti en camp de réfugiés en périphérie d’Athènes. Je suis contente de pouvoir aller à l’école mais, avec mes amies, nous cherchons toujours une bonne excuse pour sortir de ce lieu qui ressemble à une prison. Sur cette photo, vous voyez les abris de fortune construits par les réfugiés dans l’un des anciens terminaux de l’aéroport. Le camp est en train d'être évacué mais pour l'instant, c’est là où nous vivons, là où nous dormons.
Je suis Afghane, mais je suis née en Iran. Là-bas, je ne pouvais pas aller à l'école car les réfugiés afghans n’ont pas beaucoup de droits. Alors à 14 ans, j'ai commencé à travailler dans un cabinet médical. Lorsque le gouvernement iranien a commencé à envoyer des réfugiés afghans se battre en Syrie, nous avons su que nous devions partir. Nous ne voulions pas que mon frère parte faire la guerre.
Il y a deux ans, mes parents ont envoyé ma sœur en Allemagne. Mon frère est parti l’année suivante. Ils ont maintenant 17 et 21 ans. On espère bientôt pouvoir les rejoindre mais pour l’instant nous sommes bloqués ici, en Grèce.
« Je voudrais raconter à quel point je me sens seule. »
Il y a quelques jours, je me suis réveillée très tôt. Ma première pensée a été : « je suis toujours coincée ici... » Mais finalement, c’était une belle journée, pour moi et pour tous les réfugiés du camp. Un match de football a été organisé. On s’est bien amusés. Garçons et filles, enfants et parents étaient réunis. On applaudissait pour encourager les joueurs.
En fin d’après-midi, en retournant vers notre tente, j’ai vu un homme dessiner. Il était très doué. J'aimerais pouvoir dessiner comme lui et avoir un moyen de m’exprimer. Je voudrais raconter à quel point je me sens seule.
« Nous, les femmes, nous tenons à notre indépendance. »
En fin de journée, j'adore me promener le long de la mer. Le coucher de soleil est à l’image de ma vie. Il y a un peu de lumière et un peu d'obscurité. Ma vie est triste, je ne l’ai pas choisi.
Ce soir-là, j'ai vu une fille assise sur la plage. Ses yeux étaient bleus comme la mer. Elle m'a dit qu'elle venait des États-Unis, qu'elle voyageait seule. Nous, les femmes, nous tenons à notre indépendance. Nous sommes à la fois fortes et sensibles, c'est ce qu'il faut pour pouvoir avancer. Dans un sens, cette fille était un peu comme moi… loin de chez elle... même si, au lieu d'être en vacances, ma famille a fui un pays déchiré par la guerre.
« Je suis patiente et je garde espoir. »
Sur le chemin du retour, j'ai vu un pêcheur, seul sur le front de mer. Je me suis demandé s'il venait ici en fin de journée pour se sentir mieux. Si, lui aussi, cherchait un peu de réconfort dans les couleurs de la mer et du ciel.
Il y a beaucoup d'histoires sur des personnes qui se sentent seules. Ma préférée est "La Petite Fille aux allumettes". Chaque fois qu'elle est triste, la fillette brûle une allumette. Elle devine de belles images dans la flamme chaude et brillante. Je me sens comme elle. Je suis patiente et je garde espoir.
Parfois, je crois en un avenir meilleur. Je voudrais devenir artiste ou infirmière. Il y a beaucoup de tristesse autour de moi, mais je suis sûre que lorsque nous serons réunis avec mon frère et ma sœur en Allemagne, je pourrai réaliser mes rêves. Je me dis que bientôt tout ça sera fini. Quand ? Je ne sais pas mais c’est le vœu que je fais chaque soir.
Cette histoire fait partie d’une série de témoignages photographiques intitulée « À travers mes yeux de réfugiée », initiée par l’ONG CARE, en collaboration avec le centre social Melissa et avec le soutien de la Commission européenne. Trois femmes et jeunes filles réfugiées décrivent leur vie quotidienne en Grèce.
CARE apporte une aide d'urgence aux réfugiés bloqués en Grèce. Le centre Melissa soutient l'intégration des réfugiées en Grèce.
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