Plus de 654 900 réfugiés syriens vivent actuellement en Jordanie, selon le Haut Commissariat aux réfugiés. La majorité d’entre eux vivent dans des conditions très précaires et souffrent de cet exil forcé. Pour lutter contre le désœuvrement, Mohammed, 65 ans, fabrique des jouets pour les enfants du camp d’Azraq avec le soutien de CARE.
« Ça rend les gens heureux, ils viennent parfois me regarder travailler. »
Ils m’appellent « le fabricant de jouets ».
Je vis dans le camp de réfugiés d’Azraq, dans le nord de la Jordanie, qui abrite plus de 30 000 Syriens qui ont fui la guerre. Beaucoup de réfugiés ont la sensation d’être ici comme un lion en cage. Ils n’ont rien d’autre à faire que de fixer les abris métalliques installés au beau milieu du désert.
Je suis arrivé il y a trois ans. Moi aussi, je me suis longtemps demandé comment je pourrais bien occuper mon temps. Je me disais : « Il faut absolument que je trouve quelque chose à faire. » Chez moi en Syrie, il m’arrivait de fabriquer des jouets pour mes enfants ou pour mes neveux. J’ai alors commencé à fabriquer de petits avions en papier pour les enfants du camp.
Les équipes de CARE, qui mènent des activités de soutien psychosocial dans le centre communautaire du camp, m’ont fourni de la peinture et tout ce dont j’avais besoin : des matériaux naturels ou recyclés. Je trouve aussi des bricoles ici et là. Très vite, les idées ont commencé à fuser. Combien de jouets j’ai fabriqués depuis mon arrivée au camp d’Azraq ? Je n’en ai aucune idée. Beaucoup ! Je ne les ai jamais comptés ! Ça rend les gens heureux, ils viennent parfois me regarder travailler.
« La Syrie est toujours dans mes pensées. »
Je viens de Homs, une ville de l’ouest de la Syrie. Avec ma femme, nous habitions dans une petite ferme. Je vendais le lait de notre vache et quelques fromages. J’avais un petit commerce. J’aimais aussi m’occuper de mon jardin.
Nous avons quatorze enfants, sept fils et sept filles, qui ont aujourd’hui entre 21 et 42 ans. Tous ont fui la Syrie, à part l’une de nos filles. Elle vit toujours là-bas. Elle n’y est pas en sécurité. J’ai peur qu’elle soit victime des bombardements. C’est une menace permanente.
En bricolant des jouets, j’échappe un peu à ces inquiétudes. Mais la Syrie est toujours dans mes pensées. Beaucoup des jouets que je fabrique sont inspirés de la vie que j’ai laissée derrière moi. Les vaches et les canards me rappellent ma ferme. J’ai fait une réplique de ma maison en Syrie. Du rose pour le toit, du jaune et du beige pour les murs, une humble palissade, cette maison de poupée est l’une de mes pièces les plus précieuses.
J’espère pouvoir rentrer un jour en Syrie et retrouver la vie paisible que je menais. D’ici là, je veux continuer à répandre de la joie autour de moi.
Soutenez nos actions en faveur des populations syriennes
L’ONG CARE et ses partenaires ont fourni une aide humanitaire à plus de 2,5 millions de personnes en Syrie et dans les pays qui accueillent des réfugiés syriens.
Ce texte a été publié par le Journal du Dimanche