L’excision est pratiquée par respect de la coutume et par pression sociale

Dans la région de Mandoul, au Tchad, plus de 80% des femmes et des filles sont excisées (1). Pourtant, dans ce pays, les mutilations génitales sont illégales depuis 2002. Pour quelles raisons les habitants et habitantes continuent-ils à braver la loi et à perpétuer l’excision ? Afin d’avoir une action de lutte la plus efficace possible, CARE a demandé au Groupe URD une étude approfondie sur les facteurs sociaux et économiques de cette pratique.

« Nos ancêtres pratiquent l’excision depuis des siècles. Si on arrête, on va perdre notre culture et notre identité » , explique Clémentine*, exciseuse dans son village, dans le documentaire produit par le Groupe URD. Ce raisonnement est largement partagé au sein de sa communauté. Ainsi, l’excision est un facteur de reconnaissance sociale. S’y soustraire est synonyme d’exclusion. Les filles et les femmes sont dès lors tiraillées entre respect de la tradition et pression sociale d’un côté, respect de la loi et de la santé des filles de l’autre.

*Le prénom a été modifié pour protéger l’identité de la personne

L’ONG CARE lutte contre l’excision par la prévention et la sensibilisation

Rien ne peut justifier la violation du droit des femmes et des jeunes filles à disposer de leur corps. « L’excision peut être faite par des gens qui ne voient pas bien. On coupe n’importe où et n’importe comment, sans stériliser et sans anesthésie. Parmi les conséquences immédiates, la douleur peut tuer ! » , décrit Anne Miata, directrice de la maternité de Koumra. Pour faire cesser les mutilations génitales, il est primordial de poursuivre les efforts de sensibilisation sur les dangers liés à cette pratique et d’informer les femmes et les filles sur leurs droits.

Evelyne est militante contre l’excision auprès de sa communauté. Elle témoigne : « J’étais adolescente, j’étais partie passer les vacances chez ma tante. Mais une semaine après mon arrivée, mon monde s’est écroulé. Je ne voulais pas [me faire exciser], je pleurais. Je me suis cachée. Mais on m’a retrouvée et emmenée par la force. Les hommes portaient des sagaies, des bâtons. Comme s’ils partaient en guerre » . CARE et ses partenaires les accompagnent, elle et d’autres sensibilisatrices, dans leur action de prévention afin que d’autres filles ne subissent pas le même traumatisme physique et moral.

Découvrez le documentaire réalisé par le Groupe URD (partenaire de CARE) et financé par l’AFD, pour comprendre pourquoi l’excision est encore pratiquée de nos jours dans le Mandoul.

L’excision met en danger la santé des femmes et des filles

Le Tchad est l’un des pays au monde où les indicateurs de santé maternelle et infantile sont les plus alarmants (2). À l’hôpital de Koumra, la directrice de la maternité Anne Miata prend en charge chaque jour des femmes excisées qui souffrent de complications lors de leur accouchement. « La cicatrisation rend difficile la sortie de l’enfant. Pour aider ces femmes, on doit élargir le périnée, parfois des deux côtés pour faire sortir l’enfant, alors que chez une femme non-excisée, le périnée est élastique. Les complications obstétricales peuvent provoquer des déchirures, des infections… » .

L’ONG CARE et ses partenaires favorisent l’accès des femmes à la santé

Notre but est bien sûr de lutter contre la pratique de l’excision mais nous apportons aussi un soutien immédiat aux filles et aux femmes excisées en favorisant leur accès aux soins et à la santé. Le caractère illégal de la pratique de l’excision peut en effet compliquer leur décision de se rendre dans des établissements de santé, par peur d’être dénoncées. Pour ce faire, CARE et ses partenaires sensibilisent et forment les personnels de santé et les acteurs compétents pour appuyer la prise en charge médicale des victimes. Nous facilitons aussi leur accès aux soins en réhabilitant les centres de santé et en fournissant des équipements.

Les excisions ont un impact direct sur la santé des femmes et des filles, c’est pourquoi nous les plaçons au cœur de nos actions.

Source : (1) Enquête Démographique et de Santé et à Indicateurs Multiples au Tchad (EDS-MICS), 2014-2015 ; (2) OMS, 2018

Pour aller plus loin

L’action de CARE au Tchad

  • L’ONG CARE est présente au Tchad depuis 1975. Nous soutenons le développement économique local des populations, leur accès à la santé et luttons contre les violences basées sur le genre.
  • Entre 2019 et 2023, nous avons mis en œuvre le projet d’autonomisation sociale des femmes tchadiennes par l’accès aux services de santé (PASFASS) en partenariat avec le Groupe URD (Urgence Réhabilitation Développement) et BASE (Bureau d’Appui Santé et Environnement). Ce projet a été soutenu financièrement par l’AFD (Agence Française de Développement).

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