Bassin du lac Tchad : les jeunes plongés au cœur d’une crise humanitaire
Imaginez grandir dans une région où depuis 13 ans, les impacts du changement climatique couplés à une grave crise sécuritaire et la stratégie de terreur de groupes armés affectent la vie des populations. Comment se projeter ? Quel avenir se construire ?
C’est le défi auquel sont confrontés les jeunes de la région du lac Tchad. Partagée entre le Niger, Nigéria, Cameroun et Tchad, cette région est considérée comme l’une des plus vulnérables d’Afrique. « C’est un cercle vicieux qui se met en place : les violences armées et la pression sur les ressources naturelles entraînent des déplacements massifs de populations (1) et diminuent les opportunités économiques alors qu’on assiste à une forte augmentation du prix de la nourriture (2). Et cette crise économique et humanitaire nourrit des conflits entre populations et la propagation des groupes extrémistes », explique Laura Del Barco, responsable de projet chez CARE.
Conséquence ? Près de 7,5 millions de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire sévère (3). Face à l’une des pires crises humanitaires contemporaines (4), les jeunes se battent pour survivre et aider leur famille. Dans ce contexte de pauvreté, beaucoup de jeunes ne voient que deux options : fuir la région ou se faire recruter par les groupes armés. Alors quelles solutions leur apporter ?
"J’avais plusieurs emplois mais je ne gagnais même pas 500 NGN (un peu plus de 1 euro) par jour. Et depuis la mort de mon père, je suis responsable de mes frères et sœurs. Je dois nourrir une famille de 13 personnes."
Abbas, 24 ans, au Nigeria.
Apporter aux jeunes des opportunités économiques
Depuis 2018, CARE, Action contre la faim et l’URD soutiennent les jeunes – garçons et filles – à trouver des sources de revenus fiables. Dans ce contexte de crise, nous cherchons des solutions pérennes. Pour cela, nous répondons aux besoins en éducation et formations professionnelles adaptées au contexte local. Mais pas seulement. Car plus de la moitié des jeunes diplômés sont au chômage, du fait d’un tissu économique faible. Nous employons donc des jeunes à travers des chantiers communautaires et soutenons le lancement d’activités génératrices de revenus et de petits business.
Redynamiser le tissu économique local et créer plus d’opportunités pour les jeunes
Par exemple, nous employons directement des jeunes dans des chantiers de construction ou réhabilitation d’infrastructures communautaires (puits, barrages, fixation de dunes, routes rurales, etc.). Cela permet de soutenir l’agriculture et le commerce local. 80 à 90 % de la population locale dépend de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche. Pour les producteurs, par exemple, la mise en place de systèmes d’irrigation modernes permet d’augmenter leurs productions.
L’avantage est double : l’accès à la nourriture s’accroît et les agriculteurs augmentent leurs revenus. Autre point positif de ces chantiers de construction : il n’y a plus besoin de quitter le village pour s’approvisionner ou trouver un travail. C’est un revenu régulier pour les jeunes qui peuvent subvenir à leurs besoins alimentaires et non alimentaires. Le montant de leur salaire leur permet aussi de constituer une épargne pour ensuite créer des activités économiques.
Soutenir les jeunes entrepreneurs
Autre exemple, nous accompagnons des jeunes à créer leurs propres activités, suite à une formation professionnelle complète ou par le biais de soutien technique et financier de CARE et d’associations villageoises d’épargne et de crédit que nous créons. Les membres de ces groupes mettent leurs économies en commun pour se faire ensuite des prêts.
« Grâce à ce projet, j’élève maintenant mon bétail : j’achète et je nourris des chèvres et des béliers puis je les vends », explique Abbas. « Avec les bénéfices tirés de la vente, j’ai monté une entreprise de recharge de téléphones portables. » CARE aide en effet les jeunes à diversifier leurs sources de revenus afin qu’ils ne soient pas vulnérables aux crises. Grâce à ces deux emplois, Abbas gagne en moyenne 1 000 NGN par jour.
"J'ai un moyen de subsistance sur lequel je peux compter, je suis plus stable maintenant, et ma famille peut se nourrir correctement. Et je peux même économiser."
Abbas, 24 ans, au Nigeria.
En savoir plus sur le projet RESILAC : Le projet RESILAC est mis en oeuvre par le Consortium d’Action Contre la faim (chef de file), CARE et le Groupe URD en partenariat avec des organisations nationales et locales, grâce à la contribution financière de l’Union européenne et de l’Agence Française de Développement. Le contenu de cet article relève de la seule responsabilité de CARE et ne reflète pas nécessairement les opinions des bailleurs de fonds.
Sources :
(1) Au 17 janvier 2022, 2,8 millions de déplacé·e·s internes
(2) FAO, Bassin du Lac Tchad: une crise profondément ancrée dans le contexte de la faim, de la pauvreté et de l’absence de développement rural, 2017.
(3) Ibid
(4) Groupe URD, « Approche territoriale en contexte de crise : levier pour le renforcement de la résilience », Mars 2022.
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