Pertes et dommages : la réunion de la dernière chance

Décidée en toute hâte suite à l’échec des pourparlers en Égypte (il y a moins 2 semaines), hier et aujourd’hui se tenait à Abu Dhabi la dernière réunion du Comité de transition en charge de rendre opérationnel le Fonds pertes et dommages. L’objectif ? Aboutir à un consensus pouvant être soumis à l’ensemble des gouvernements en vue de la COP28 qui commence dans moins d’un mois. Mais le texte proposé aujourd’hui est bien loin des avancées espérées et nécessaires au vu de l’urgence climatique. Une fois de plus, on a assisté de la part des pays développés à des positions déconnectées de la réalité, dénigrant ce que vivent les populations frappées par les pires effets des dérèglements climatiques. 

 

Un texte très décevant, accepté à contre coeur

Voici l’analyse de Fanny Petitbon, responsable plaidoyer de l’ONG CARE France : 

« Le bilan de cette réunion est un texte très décevant, accepté faute de temps et à contre cœur par les pays en développement. C’est absolument inacceptable : les pays en développement ont dû sacrifier des points importants pour ne pas totalement bloquer la dynamique autour du Fonds, à un mois de la COP28. À l’inverse, certains pays développés ont fait preuve d’un profond cynisme en restant campés sur leurs positions. Par exemple, sous la pression des pays développés, le texte ne prévoit aucune obligation pour que ces derniers contribuent financièrement au Fonds. Aucun chiffre ne figure alors même que les pays en développement demandaient une somme plancher de 100 milliards de dollars par an. Tout en sachant que d’ici 2030 les pays en développement pourraient subir des pertes allant jusqu’à 580 milliards de dollars par an » .  

Le rapport de force en défaveur des pays en développement

« Cependant, il est à noter que le bloc des pays développés a commencé à se fissurer. D’un côté, certains pays (Allemagne, France, Norvège, Canada) ont adopté une position plus ouverte et constructive. De l’autre, des pays, comme les États-Unis ou le Japon, ont gardé une position ferme qui a suscité beaucoup de consternation, notamment sur le refus de lier la responsabilité du paiement des pertes et dommages aux émissions historiques. C’est d’autant plus incompréhensible que c’est l’inaction climatique de ces mêmes États développés en matière de réduction des émissions et le non-respect de leurs promesses financières à destination des pays du Sud qui ont conduit aux pires impacts du changement climatique –les pertes et dommages- dont il est question avec ce Fonds. 

Le rapport de force a encore joué en défaveur des pays en développement. Et ce, alors qu’ils avaient démontré d’entrée de jeu leur volonté de trouver des compromis, en particulier en faisant l’énorme concession d’accepter que le futur Fonds pertes et dommages soit hébergé de manière transitoire par la Banque mondiale, mais sous conditions (notamment que les pays qui ne font pas partie de la Banque mondiale ou les communautés affectées puissent être soutenus directement). Une décision difficile alors que cette institution est l’objet de multiples critiques sur sa gouvernance et ses pratiques. D’autant plus que le texte ne prévoit pas de stratégie claire pour sortir le Fonds du giron de la Banque mondiale si celle-ci ne respectait pas les termes du contrat. 

L’année dernière, ce Fonds avait été salué comme une décision historique, un pas de géant, après plus de 30 ans de blocage des pays riches sur la question des pertes et dommages. Suite à la réunion d’aujourd’hui, tout va se jouer désormais à la COP28, dans moins d’un mois. Le reste des gouvernements va-t-il rectifier le tir à Dubaï et s’assurer que le fonds réponde véritablement aux besoins des centaines de millions de personnes qui subissent de plein fouet les pires impacts du changement climatique chaque année (cyclones, inondations, montée du niveau des mers, etc.). ?  Un échec serait un pied de nez monumental après l’espoir suscité lors de la COP27 » .

Contact presse pour les médias : 

  • Fanny Petitbon, notre experte climat est disponible pour toute demande d’interview. Fanny participera également à la COP28. Contactez Laury-Anne Bellessa et Chloé Sublet, 07 86 00 42 75, bellessa@carefrance.org ; sublet@carefrance.org  

L'action de CARE face au climat

Fondée en 1945, CARE est l’une des principales organisations humanitaires au monde, travaillant dans 111 pays. En 2022, nous avons aidé 174 millions de personnes dans le monde. CARE cherche à s’attaquer aux causes sous-jacentes de la pauvreté et à lutter contre les effets du changement climatique. Nous accordons une attention particulière aux femmes et aux filles, qui sont les plus touchées par les impacts climatiques. Pour cela :

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  • Lors des conférences internationales sur le climat, nous soutenons la voix des populations les plus affectées afin que les gouvernements prennent des mesures concrètes et ambitieuses contre le changement climatique.

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